L’institut de sondages IFOP a sorti une enquête très intéressante au sujet de la perception des français quant à leur propre positionnement politique. L’enquête menée sur 2041 personnes, tout de même, montre que les français s’auto-positionnent de moins en moins à gauche sur un axe Gauche-Droite. En effet, sels 13% des français se définissent comme de gauche dans cette étude. Dans le même temps, ils sont respectivement 32% et 39% à se positionner au centre et à droite de l’échiquier politique. Notons quand même que 16% des personnes interrogées ne se prononcent pas quant à leur auto-positionnement sur cet axe. Le journal droitier Le Point, ayant commandé le sondage, y voit que c’est le signe d’une droitisation de la France. A mon sens, le journal fait une erreur d’analyse de la situation politique de notre pays.
L’effondrement du concept de Gauche dans la tête des gens n’est dû qu’à la politique menée par les gens se réclamant de la Gauche. Autant le dire tout de suite, dans l’esprit de beaucoup, François Hollande a été le dernier Président de la République de gauche que la France ait connue. Ce constat est malheureux, mais la moindre diffusion de tracts sur les marchés donne la température de cet ancrage très vivace dans les têtes de nos concitoyens. Et disons-le, le Parti Socialiste avec Hollande Président, ce fût un long chemin de croix. Toutes les trahisons y sont passées. L’ANI (accord national interprofessionnel), le CICE, les lois sécuritaires, la loi El Khormi, les lois Macron, la fermeture de Florange, la déchéance de nationalité, Manuel Valls Premier Ministre, l’absence de renégociation de TSCG et la promesse non tenue d’amnistier les syndicalistes condamnés pour leurs luttes de défense des emplois, et ainsi de suite. Bref, chacun connait le réquisitoire. Ces gens ont tué l’idée de gauche dans notre pays pour des dizaines d’années.
Si le concept de gauche est mort et enterré dans la tête de nos concitoyens, les idées de gauche n’ont jamais eu autant le vent en poupe. Pensons à la relocalisation de l’industrie, le développement l’agriculture paysanne, biologique et zéro déchet, le partage des richesses, la planification écologique, l’investissement fort dans un système de santé universel, le RIC, la sixième république et que sais-je encore. Néanmoins, vue la défiance qu’ont les citoyens, à tort ou à raison, chacun pourra se faire son idée, envers la représentation politique de façon générale, et de la gauche en particulier, ânonner sans cesse à l’union de la gauche peut apparaître comme un formidable repoussoir à l’arrivée au pouvoir des idées pourtant bien ancrées à gauche. C’est pourtant ce que n’ont et ne cessent de faire les thuriféraires de la social-démocratie mollassonne et eurobéate.
C’est dans ce contexte que Jean-Luc Mélenchon, depuis 2018, a proposé l’émergence de ce que les insoumis appellent une « Fédération Populaire ». Nos camarades de la GRS (Gauche Républicaine et Socialiste) avec Emmanuel Maurel parlent quant à eux de « Front Populaire du XXIème siècle ». Si les appellations sont différentes, nous sommes fondés à penser que le fond est relativement proche. Il s’agit donc de fédérer les forces associatives, syndicales, politiques et citoyennes. Pas dans un but électoraliste, mais avec l’idée qu’à partir de là peut s’auto-organiser la société et la constitution d’un véritable front populaire. La chose n’est pas aisée, et la formule, loin d’être magique.
A mon échelle, en septembre 2019, j’ai eu le plaisir de répondre favorablement à l’invitation de mon camarade Denis Lamard, conseiller régional GRS de Bourgogne-Franche-Comté à leur rentrée politique. Durant un court discours, j’y avais défendu devant des représentants d’EELV et de Génération.s l’impérieuse nécessité de fédérer les luttes afin de gagner des batailles culturelles et politiques. J’ai donc parlé de fédération populaire, pensant à cette époque, comme aujourd’hui, qu’elle serait la seule voie à une prise de pouvoir en 2022. Non pas juste une prise de pouvoir institutionnelle, mais avec un réel soutien populaire et ancré profondément dans la société. Car prendre le pouvoir sans les forces vives du pays, c’est risquer des échecs terribles.
Mais pour fédérer le Peuple, encore faut-il commencer par s’adresser à lui dans son ensemble. C’est par exemple en cela que Jean-Luc Mélenchon est présent sur YouTube, mais aussi plus récemment sur Twitch et TikTok. Il est absolument inenvisageable de manquer de s’adresser à une foultitude de personnes qui ne seront jamais exposées, de près ou de loin, aux propositions que nous pouvons faire pour le pays. Avec seulement 15% de français se définissant de gauche, il semble illusoire que tout miser sur la réactivation du mot de gauche soit d’une aide quelconque pour la prise du pouvoir. A y regarder de plus près, l’auto-positionnement des sympathisants de la France insoumise est intéressant : alors que 41% d’entre eux se définissent de gauche (c’est beaucoup), 59% ne se positionnent pas là, et se répartissent entre le centre, le non-choix et la droite. Nous observons le même phénomène avec les électeurs de Jean-Luc Mélenchon en 2017. Je vous incite à regarder également où s’auto-positionnent les électeurs de Benoît Hamon et les sympathisants EELV.
Celles et ceux qui se définissent de gauche savent pertinemment que la France insoumise porte un projet fondamentalement ancré dans l’histoire de ce courant politique. Le problème n’est donc pas là. Le plus ardu réside dans le fait d’amener la masse de nos concitoyens sur un programme de gauche sans agiter le repoussoir de la Hollandie et ses queues de comètes gesticulantes. C’est bel et bien la constitution d’une Fédération Populaire qui doit nous occuper. Demain, ce n’est pas si loin…